Ces dernières années, on a vu sortir de plus en plus de motos intégrant des pièces réalisées grâce à la technique de l’impression 3D. J’ai eu envie de faire un tour d’horizon des applications explorées jusqu’ici par les fabricants et les préparateurs. C’est parti !
Impression 3D et prototypage
Dès leurs débuts, les imprimantes 3D ont intéressé industriels et designers. En atelier, les impressions en résine sont encore utilisées durant le prototypage des machines. Pour un préparateur, une pièce originale imprimée en polymère permet des vérifications avant usinage. Chez les fabricants, les parties imprimées peuvent venir compléter les habituels modèles en argile.
Évolutions et impression des métaux
Le développement logique des technologies d’impression 3D est d’intégrer toujours plus de nouveaux matériaux. Ainsi en est-il du béton imprimé, déployé dans l’industrie du BTP ou des impressions métal qui impactent progressivement les pratiques de nombreux secteurs.
Dans l’univers des transports, de grands groupes comme BMW ou Airbus les investissent tant pour des projets démonstrateurs que pour de la production de masse. Mais les grands groupes ne sont pas les seuls à s’emparer de ces technologies. Des préparateurs européens les utilisent aussi pour inventer des pièces uniques qu’ils intègrent à leur création.
Impression 3D chez les préparateurs français
Côté français, l’atelier Viba fait régulièrement parler de lui. Ce dernier conçoit des motos au design raffiné en séries très limitées d’une vingtaine d’exemplaires pour chaque modèle. Les machines intègrent de nombreuses pièces imprimées en 3D dans différents matériaux. Qora, Lara, Jane, chacune de leur préparation porte un nom de femme.
Leur dernière création s’appelle Cara, en hommage au modèle britannique Cara Delevingne. Ci-dessous, on voit deux exemples de pièces imprimées, le réservoir et un garde-boue.
En 2018, on avait également vu la moto Alter émerger de la collaboration entre Yamaha et le préparateur français DAB Motors. Le projet tout entier s’appuyait sur la conception par ordinateur. La boucle arrière de cadre, le té de fourche supérieur, les réhausseurs et les supports de phare étaient tous imprimés. La carrosserie était réalisé en fibre de lin.
Dans ces deux exemples, les marques se positionnent sur un imaginaire high-tech et futuriste. Il y a plus de formes angulaires qu’à l’accoutumée et pas mal de prises de risques formelles en général.
Impression 3D chez les préparateurs européens
Toujours dans une veine futuriste, on peut regarder du côté de l’Espagne avec la moto Morlaco de Bott Power. Le projet amorcé en 2002 est mis en pause puis relancé à plusieurs reprises. On sent dans son design un goût prononcé pour la modularité. Sur son site, le designer annonce qu’il peut démonter sa moto en moins d’une minute à l’atelier.
Enfin, on peut faire un tour en Autriche, pour redécouvrir la Honda-NX650-V13 de Vagabund. Là encore, il semble que les formes géométriques angulaires, voire triangulaires, soient associées à la technologie de pointe (ha ba oui, logique du coup…).
Certains projets cherchent à pousser la technologie dans ses retranchements comme les Allemands de Bigrep et leur moto Nera (pour New Era). Le véhicule au nom pompeux est intégralement imprimé en 3D y compris ses roues sans pneus. Mais quelle est la destinée de cette moto ?
Sur la route, la moto semble bien fragile et instable. Lorsque la préoccupation de l’innovation prend le pas sur la dimension utilitaire, le sens se perd en chemin. Mais je vous laisse regarder leur démo et décider par vous-même si vous pensez que le projet tient la route.
Bricolage expert et technologie de pointe
Dans l’univers, des préparateurs certains ont déjà enfourché le tigre de l’impression 3D métal et impriment des pièces originales en acier ou titane qu’ils intègrent à leurs machines. C’est le cas par exemple de l’atelier Fuller Motorcycles d’Atlanta qui a réalisé ce modèle unique et futuriste baptisé 2029.
Futuriste ? Oui et non. 2029 est une relecture contemporaine de la Majestic de 1929. Le défi était proposé à Bryan Fuller par Bob Haas qui possède son propre musée de la moto à Dallas. Elle figure désormais au sein de sa collection.
Notons que Bryan Fuller a invité Nick Pugh à travailler avec lui sur la machine. Nick est un artiste connu pour ses designs de véhicules de fiction tels que des vaisseaux de l’univers Star Wars.
Pour Fuller, Pugh a dessiné des pièces aux formes organiques comme le guidon. Celles-ci ont ensuite été imprimées en titane. Un exemple amusant des contaminations incessantes entre science-fiction, design et nouvelles technologies.
Pendant la fabrication, les préparateurs de l’atelier ont également recours à des techniques classiques de construction. Ainsi, outils rudimentaires et outils ultras technologiques participent ensemble à la naissance de l’objet.
Pour prolonger cette réflexion, je souhaite parler de l’atelier Auto Fabrica qui joignent eux aussi nouvelles technologies et savoir-faire artisanal. Le meilleur des deux mondes, comme le dit l’expression.
Cette combinaison de savoir-faire artisanaux avec des techniques de pointes telle que l’impression 3D permet de sortir du stéréotype qui consiste à les opposer comme les représentants de deux époques distinctes. L’occasion de mettre en pause (ou à l’arrêt) la course permanente à l’innovation et de repenser à notre relation aux outils, au travail et au temps.
Formes organiques et basculement esthétique
Tout ingénieur ou designer qui a travaillé sur la répartition des forces et des contraintes s’exerçant sur un objet, un outil ou une machine connaît ce phénomène : le passage d’un aspect industriel à un aspect organique.
Alors que l’on tend vers la forme la plus efficace en termes de quantité de matière, de légèreté, de circulation des forces, on voit émerger des formes plus fluides, comme produites par la nature elle-même.
En ce qui concerne les deux roues, on retrouve ce principe dans cet exemple d’hybride électrique situé à mi-chemin entre le vélo et la moto réalisé par AP Works (une branche d’Airbus) en 2016.
Pour optimiser le poids et la résistance, on opte ici pour cette esthétique organique osseuse. Le châssis est en aluminium pour la légèreté et le bien nommé Light Rider monte tout de même à 80 km/h.
Enfin, je finirais ce tour d’horizon avec un prototype de la marque BMW. Il s’agit d’un châssis de S1000RR présenté en 2018. On imagine que ce dernier puisse être partiellement ou intégralement recouvert par une peau.
Un mode de fabrication qui n’a pas vocation à être poussé à grande échelle pour l’instant. Alors, à quand les véhicules intégralement imprimés en grande série ? On reste aux aguets.