Pour rivaliser sur un oval de flat track, mieux vaut chevaucher une machine agile avec du couple à revendre. Et si nombre de monos ou twins offrent le coup de pied nécessaire pour tenir un travers sur plusieurs dizaines de mètres, constituer une partie cycle efficace sur les pistes du circuit national est une toute autre histoire. Celle du dernier tracker de Thomas Beuillé commence autour d’un bloc de MT-07 mais la suite relève du sur-mesure… de haut vol !

Un tracker à la carte taillé pour la course
Depuis maintenant plusieurs années, Thomas Beuillé passe ses week-ends à peaufiner sa glisse sur les poussiéreux ovals du Sud-Ouest. Après avoir roulé une CRF450 puis une Harley Sportster trackerisée par ses soins, il finit par porter les couleurs de Ducati Bayonne au guidon d’une Scrambler 900 préparée pour le circuit national. Et cette collaboration aura été fructueuse puisque pour sa première participation, Thomas terminera 3ème de la catégorie reine – Power Bikes – tenue par le sextuple champion de France, Wilfried Delestre.



Le flat track restant une discipline émergeante, il est cependant délicat de se procurer des pièces adaptées. Il se met donc rapidement à répondre lui-même à ses besoins, à défaut de trouver son bonheur sur le marché. Et avec l’expérience acquise, Thomas a commencé à se faire une idée précise de ce qu’il attend de sa machine pour emporter le titre. Plutôt que d’apporter des modifications sur un châssis existant, il a ainsi pris le pari d’en concevoir un de toutes pièces : un défi de taille pour répondre à son idéal.
Thomas m’expliqua qu' »en comparaison avec les pistes américaine, le standard européen est beaucoup plus court. Les vitesses atteintes en ligne droite ne sont donc pas comparables » et plutôt que d’assurer la stabilité de la partie cycle, il a ainsi cherché à optimiser sa maniabilité en courbe. L’angle de chasse a été refermé et l’empattement réduit de 22 cm en comparaison à la géométrie de la MT-07. Du haut de son 1m82, il a également cherché à rehausser son assise pour parfaire sa position. Une fois que tout fonctionne sur le papier, la suite de l’histoire se passe dans l’atelier.



Une MT-07 CMS, première du nom
D’un coup, la magie opère. Et si j’ai été surpris de l’aboutissement de son travail sur le cadre pour un premier jet, tout prit sens quand il m’expliqua que son père est soudeur dans l’aéronautique et qu’il le forma sur ses techniques au fil des années passées à bricoler ses motos. Accompagné de sa bonne compagnie et d’un atelier dignement équipé, il est ainsi parvenu à donner vie à cette toute nouvelle ossature, d’une qualité de finition remarquable. Papa soudant des pièces d’avion, le contraire m’aurait étonné !

A l’observer dans le détail, rien sur cette « MT » – pour autant que l’on puisse encore la nommer comme telle – n’a été optimisé pour la course. Pas de fioritures ni artifices, ce tracker honore l’adage anglo-saxon light is right avec brio. Dans sa quête de réduction de l’empatement, Thomas a retravaillé la géométrie du bras oscillant en cantilever. L’amortisseur a lui été créé de toute pièce et préparé par EMC avec un tarage optimisé pour cette géométrie et le poids de Thomas. La fourche – d’origine sur la MT – est également passée entre leurs mains et accueille de nouvelles cartouches de détente et compression. Pour les roues, Thomas a été amené à tourner des axes pour adapter une paire d’Alpina de 19″.



Les plaques avant et latérales, l’assise et le réservoir ont également été créés par Thomas, dans un style radical et géométrique. Il m’a cependant confié que les premiers essais l’ont amené à élargir sa selle pour gagner en confort. Sa machine n’ayant pas besoin d’être street legal, il ne s’est pas encombré de feux, immatriculation, frein avant ou rétroviseur et en a profiter pour simplifier le faisceau à son plus simple appareil.
De la MT-07 au tracker
Pour s’assurer un meilleur contrôle en glisse, Thomas a reculé son cintre Pro Taper de 6 cm avec des pontés usinés maison. Comme il est coutume sur les machines de flat, le maître cylindre droit actionne désormais le frein arrière. Les platines de reposes-pieds sont également de sa conception. Leurs multiples perçages permettent d’ajuster la position pilotage asymétrique – une des spécificité de la discipline – au cm près.





Autour du bloc de 689 cm3, la boite à air a été supprimée au profit de cornets. Le radiateur d’origine étant suffisamment compact, Thomas a pu le conserver en lui adjuvant un vase d’expansion en aluminium. Le collecteur d’origine a également été conservé mais délesté de son catalyseur. A l’image d’une grande majorité des composant de cette CMS #1, l’échappement est une création maison en aluminum et acier inoxydable. Les premiers essais sur piste révélant un niveau émis un peu insolant, Thomas me confia avoir depuis retravaillé sa conception en le rallongeant et refermant un peu ses chicanes.



La première page de l’aventure CMS
Pour garder un souvenir ému des mes premiers tours de roues concrétisant mes nombreuses heures passées à travailler sur ma modeste préparation, j’imagine bien le sentiment de Thomas lors de ses premiers tours de roues sur son tracker home-made ! D’autant plus qu’il m’avoua avoir été agréablement surpris de ses sensation et du comportement dynamique de sa création. Sans surprise, le bloc de 90 ch fait le job mais avec ses 130 kg et sa géométrie raccourcie, Thomas garde surtout un souvenir spécial du caractère intuitif et de la facilité avec laquelle la machine s’inscrivait en courbe.

Et c’est de bonne augure pour la suite ! Avec CMS, Thomas projette de développer d’avantage de cadres à la carte au service des pilotes de flat. Il semblerait qu’un framer de 450 CRF et un projet de petite série de 17″ avec moteur incliné soient dans les tablettes… mais pour l’heure, les plus curieux sont invités à voir tourner sa « MT » le 14 mars sur l’anneau de Morizès !
Thomas Beuillé, Custom Motorcycles Solution – Instagram | Facebook
Ha et dernière chose… Cafe Racer #110 est arrivé dans les kiosques ou dans votre boite aux lettres !