Moto Guzzi V50 « Beretta » par Deus Customs Tokyo — La petite sirène du bitume

En réalisant un café-racer sur base de Moto Guzzi V 50, l’atelier Deus Customs Tokyo célèbre les cent ans de la marque italienne. L’équilibre des formes sur cette petite préparation baptisée « Beretta » devrait, en principe, attirer tous les regards.

Sing a Japanese tune

La plupart des boutiques de la marque Deus Ex Machina possèdent un atelier de customisation. C’est le cas de l’enseigne de Tokyo où le chef mécanicien s’appelle Tomoyuki Soeda. Il est spécialisé dans deux styles de préparations. Le premier est assez répandu puisqu’il s’agit du brat-style. Le deuxième est plus confidentiel. Il a connu son heure de gloire au pays du soleil levant dans les années 90 et se nomme Suka-Tune-style.

Les préparations dans ce style sont aisément reconnaissables. Ce sont des scramblers avec un bras oscillant allongé et des gros pneus ballons à crampons qui donnent à ces motos, dont le design est dérivé des Suzuki VanVan ou des Yamaha TW, une dégaine que l’on pourrait qualifier de cartoonesque. Mais la dernière préparation issue de l’atelier nippon se démarque de ses congénères. C’est un café-racer de poche paré d’une superbe décoration rétro et basé sur une Moto Guzzi V 50 II de 1980.

Entre deux tailles

La série des V 50 fut produite par la marque italienne de 1977 à 1987. Elles étaient propulsées par un moteur v-twin à 90° refroidi par air et dont la position perpendiculaire à la route est typique des motos de la firme lombarde. Avec une puissance de 39 ch, on peut considérer que c’étaient des motos relativement petites. Elles étaient concurrencées au sein même de la marque à l’aigle par deux autres séries. La première était la V 35, une vraie petite avec seulement 350 cm3 de cylindrée. La deuxième était la série des V7 qui étaient des routières puissantes. C’est à cause de leur positionnement entre deux types de motos aux caractères francs, et non à cause de leur fabrication et de leurs caractéristiques techniques qui étaient excellentes, que les V 50 eurent du mal à s’imposer auprès du public.

C’est néanmoins à partir d’une de celles-ci que Soeda a réalisé le café-racer baptisé « Beretta ». Il fallait une base de petite cylindrée pour celle qui porte le nom d’un revolver de poche. Quand au choix de la marque Moto Guzzi, c’est évidemment pour rendre hommage au plus ancien des fabricants italiens de motos qui fête, en cette année 2021, son premier siècle d’existence.

Un siècle, des siècles

Cet anniversaire particulier donne à la firme lombarde son ticket d’entrée dans un cercle très fermé. Il s’agit de celui des industries motocyclistes dont la production a duré plus de cent ans sans jamais s’interrompre. Depuis 2003, Harley-Davidson était alors le seul membre de ce club. BMW devrait en devenir le troisième à partir de 2023.

En donnant le nom « Beretta » à leur café-racer, les préparateurs japonais rendent hommage à une autre marque qui a vu le jour, comme Moto Guzzi, au pays de Dante. Elle appartient elle aussi à un cercle très fermé, celui des industries qui sont centenaires. Mais pour le coup, elle y appartient depuis beaucoup plus longtemps puisqu’elle fêtera ses cinq cents ans en 2026.

S’il y a bien des aspects de leurs préparations sur lesquels les japonais sont particulièrement attentifs, ce sont la fluidité et l’harmonie des formes. C’est le cas ici et l’on ne peut que s’en réjouir. Si l’on décide de suivre l’ensemble des pièces qui composent la moto, on aura une sensation de parfaite continuité entre les différentes parties.

De l’avant vers l’arrière…

Commençons par le réservoir de cette Moto Guzzi préparée par Deus Customs Tokyo. Il est assez large sur l’avant puis assez fin sur l’arrière. L’angle entre les deux parties, situé au niveau des genoux du pilote, est saillant. Cela rappelle les motos de course avec lesquelles Moto Guzzi a remporté beaucoup de succès dans les années 50 : la v-twin 500, l’Ottoclilindri et la quatre cylindres en ligne 500.

Ensuite, si l’on part du réservoir pour se diriger vers l’arrière de la moto, on passe alors sans un seul accroc à la selle puis au capot arrière. En observant depuis le dessus, l’on ne peut qu’admirer la finesse de cette ligne. C’est en s’inspirant de la silhouette des sirènes que Soeda l’a dessinée. Et pour affiner le tout encore un peu plus, un creux est taillé dans l’arrière de la selle et le haut du capot. Là-aussi, la fluidité entre les deux éléments est parfaite.

… et de haut en bas

Si l’on retourne au point de jonction entre le réservoir et la selle et que l’on décide de suivre la ligne du cadre qui part vers le bas, on trouve là aussi une continuité nette entre le réservoir et le cadre. Arrivé au point de fixation du bras oscillant, c’est en suivant une courbe qui épouse parfaitement l’arrondi de la roue que l’on peut remonter vers l’arrière. Puis, au point d’attache de l’amortisseur, cette ligne se redresse pour rejoindre le capot et former avec lui une magnifique pointe.

Par ailleurs, on peut également suivre la ligne d’échappement. On remarque alors que les silencieux de type mégaphone s’arrêtent pile au niveau de l’axe de la roue arrière. En cela, ils apportent beaucoup à l’harmonie générale. Avec la suppression des caches latéraux ainsi que la dissimulation des équipements électriques sous le capot, la selle et le réservoir, la V 50 II préparée par Soeda gagne en pureté et en légèreté dans son design.

Le rouge et le vert

À la finesse de ces lignes vient s’ajouter une superbe décoration. Cela commence par un logo jaune sur fond rouge entièrement peint à la main. Le rouge est généralement la première couleur qui vient à l’esprit quand on pense aux autos ou motos italiennes. D’ailleurs, comme Ferrari, Alfa Roméo ou Ducati, Moto Guzzi a beaucoup contribué à cela. Le rouge était la teinte principale de toutes les motos de la marque à l’aigle pendant les quarante premières années de sa production.

Le logo est appliqué sur un avant de réservoir peint en vert foncé, une teinte qui ne manque pas d’évoquer le monde des sirènes. On retrouve cette couleur sur le cadre ainsi que les tés de fourche. Le vert tient lui aussi, après le rouge, une place importante dans l’Histoire de Moto Guzzi. C’était la couleur de la Normale, première moto produite en série par l’usine de Mandello del Lario. C’était aussi celle de l’Ottocilindri et de la Bialbero. À l’exception des jantes recouvertes d’un noir brillant, le reste de la moto est exempt de toute peinture. Un aigle gravé au laser sur l’écrou de la colonne de direction vient ornementer le tout d’un détail luxueux.

Un regard dans le rétro

Contrairement à l’aspect visuel, le moteur de la Moto Guzzi V 50 de Deus Customs Tokyo a subi peu de modifications. En dehors des silencieux de type GP, seuls les carburateurs ont été changés. C’est un système Keihin FCR modifié qui remplace les Dell’Orto d’origine. Il en va quasiment de même pour la partie cycle. Le châssis, les roues, le bras oscillant, la fourche et les freins à disque Brembo de la V 50 II d’usine ont été conservés. Quand un élément a été changé ou rajouté, c’était principalement pour des raisons esthétiques. Ils apportent tous une petite touche rétro, aussi bien les vis en laiton sur le capot arrière et le mini pare-brise, que le compteur analogique Motogadget MST Vintage ou le cuir de couleur crème sur la selle.

Seuls les feux sont d’une technologie et d’un design moderne. Ils sont tous à LED, aussi bien le phare avant que la bande de feux arrières superbement intégrée dans la boucle. Notons également la présence de pneus en dent de scie, d’une paire de phares latéraux avant Hella et de nouveaux leviers avec câbles en acier tressés. Le réservoir de liquide de frein, pour finir, est positionné à l’avant du réservoir d’essence. Cela explique la présence d’un deuxième bouchon de remplissage à cet endroit.

Avec cette Moto Guzzi V 50 « Beretta », Deus Customs Tokyo montre une fois de plus la grande importance que l’ensemble des préparateurs accorde à l’harmonie de leurs designs. Pour un peu, on succomberait au charme de ce petit café-racer comme on cède au chant des sirènes.

Deus Ex Machina : Web | Instagram

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Photos : Deus Customs Tokyo