Vous avez peut-être déjà entendu son petit accent au téléphone si vous avez appelé à l’Atelier Chatokhine : toujours lookée à cheval sur de vieilles anglaises, Renia est une Franco polonaise dotée une classe démesurée. Renia roule sur tous types de machines, pourvu qu’elles ne soient pas trop modernes ou trop fades, mais c’est une passion plutôt récente.
Renia est née à Kielce dans une fratrie de quatre enfants : « Personne ne roulait à moto dans mes connaissances. » Jusqu’à ce qu’elle rencontre Jean-Yves, sont futur mari. Après quelques années d’allers-retours, Renia quitte sa vie en Pologne, son bar et sa famille pour rejoindre son amour. L’installation n’est pas facile : son master en pédagogie n’est pas reconnu en France et elle doit enchaîner les petits boulots… Jusqu’à qu’elle entre à l’Atelier Chatokhine : « Pour moi c’était le job idéal qui mélange la moto, le boulot, et les amis. C’est arrivé par hasard, même si je connais les Chatokhine depuis longtemps maintenant. Frank avait besoin d’un coup de main : je suis venue l’aider ponctuellement puis j’ai fini par être embauchée. »

La conversion
Depuis son arrivée en France, Renia s’est activement convertie à la moto : « Avant même que l’on soit ensemble, je me suis retrouvée sur les terrains de trial de Beauval ou de Mons en Belgique avec Jean-Yves. C’est là que j’ai fait connaissance avec l’univers moto qui m’a plu tout de suite. Mon rapport à la moto s’est donc créé rapidement et naturellement. » Renia découvre les voyages comme passagère sur une BSA A7, fait quelques essais sur des motos de trial, la passion de Jean-Yves. Forcément, l’aventure du permis ne peut être esquivée : « Passer le permis à 40 ans ? La question ne s’est pas vraiment posée, en fait. Il m’a été offert pour mon anniversaire. Ce fut difficile au début car je suis tombée sur un moniteur assez con qui a fait trainer mon passage de l’examen. Ensuite j’ai eu une monitrice très bien et obtenu mon permis du premier coup. »

Entre les leçons, Jean-Yves lui fait faire des heures sup’ : « Je m’entrainais dans les rues du village où j’habite au guidon d’un 883 Harley monté en rigide. Sur les chemins gravillonnés, aussi. Il fallait fermer l’essence au robinet à chaque fois que je m’arrêtais parce qu’il fuyait… Ce ne fut pas l’apprentissage le plus simple mais ça m’a formée. » Pendant ce temps, Renia avait en construction une Triumph T110 de 1958. Elle l’avait récupèrée en très mauvais état. Elle l’a refaite à son goût, avec une ligne plus légère et une belle peinture de réservoir : « Ma première moto, celle que j’aime bien. Elle est assez féminine et attire souvent l’œil des femmes. »

Le charme, toujours
Depuis le permis, Renia est montée sur toutes sortes de motos, en 2-temps ou 4-temps mais jamais plus récentes que les années 80 : « Les moto modernes ne m’ont jamais attirée. Si la conduite est plus facile, elle manque de charme. » Dans le garage de Renia, on trouve aussi une Gazella polonaise, « produite et fabriquée au même endroit et la même année que moi », une Bultaco Pur-Sang de cross et une Tribsa.

Vous l’avez compris, Renia aime s’essayer à toutes les disciplines. « J’ai fait du flat-track, participé en Hollande à la course Hells Race. Mais je pense que je ne suis pas assez rapide pour avoir de vraies sensations de glisse alors que le principe est là ! »
Son truc en fait, c’est le cross à l’ancienne. Après avoir débuté avec une Tribsa à Beauval en Caux, chez Fabrice et Marion Bazire, elle s’est prise au jeu. Elle roule alors régulièrement, mais la Tribsa la lâche : « Elle a commencé à fumer grave : il fallait refaire le moteur donc on l’a mise un peu de côté. On a alors modifié ma Bultaco Sherpa de flat-track mais le cadre n’était pas adapté. Jean-Yves a donc eu l’idée de monter une autre Bultaco à partir d’une épave. » Ainsi est née la Bultaco Pur-Sang de Renia, montée avec un moteur MK7 de 350 cm3. « Cette moto me convient très bien pour l’instant. Le moteur n’est pas trop violent et pardonne un peu plus que d’autres moteurs plus pointus. Je me fais vraiment plaisir à son guidon. J’ai participé à trois ou quatre cross à Beauval, j’ai roulé en Pologne aussi à un cross-country dans le sable. J’aime vraiment le cross à l’ancienne. C’est ma discipline ! »

Aller au bout
Quand Renia regarde en arrière, elle se demande parfois pourquoi elle ne s’y est pas mise plus tôt. « Je regrette de ne pas avoir fait du cross avant. J’aurais pu essayer quand je suis arrivée en France. Mais je pensais à tort que ce n’était pas pour moi. C’est dommage car on ne roule pas de la même manière à 30 ans et à 50. Je suis très prudente et parfois, j’ai l’impression de ne pas aller au bout de mon envie de rouler plus vite. C’est pareil pour la piste : je réfléchis trop et j’ai peur de faire certaines choses. »
Pour autant, Renia est convaincue : « Il n’y a pas d’âge pour faire de la moto. J’ai commencé très tard mais à chaque fois je me fais plaisir, peu importe la moto. Ce sont des sensations qu’on ne peut pas comparer aux autres. Rouler, c’est un moment de liberté, un moment de flottement : tu ne sais pas toujours où tu vas mais la seule chose qui compte c’est de profiter de ce moment où tu entends le bruit du moteur. Maître de toi-même, tu fais ce que tu veux. »

Renia fait toujours preuve de la plus grande humilité. Que ce soit sur les terrains de cross à l’ancienne, un ovale de flat track, ou lors d’un sprint à Monthléry, elle vous montre ce qu’il y a de meilleur chez elle. Toujours chic mais jamais dans l’excès. Quand parfois on perd le cap, Renia fait partie de ces personnalités qui vous remettent sur la voie. Merci.