Les éditions limitées s’enchaînent chez les constructeurs, qui savent qu’à peine dévoilées les motos se vendent comme des petits pains. Indian n’échappe pas à la règle et dévoile une FTR « Championship Edition ».
Série hommage limitée
Le « Wrecking Crew », l’équipe d’usine d’Indian, règne sans partage sur le AFT Progressive Championship, le championnat de flat-track américain, depuis cinq saisons (2017). De plus en plus de pression avec des restrictions techniques programmées pour le championnat 2022 devraient limiter les performances de la FTR de course. Le but, laisser un peu de perspectives de victoire aux autres constructeurs dans l’avenir. Le vent va-t-il tourner ? La domination d’Indian en flat-track est telle que cela semble improbable mais il est plus prudent de célébrer maintenant les cinq premiers titres avec cette FTR Championship Edition ! Elle sera produite à seulement 400 exemplaires disponibles dans le monde, et seulement 150 sont réservées à l’Europe.
On commence le tour du propriétaire par la livrée de cette machine, réplique de la machine de course. Sur le réservoir les cinq années où l’Indian a remporté le championnat, de 2017 à 2021, avec les petits lauriers qui vont bien. Le carbone est omniprésent, sur le capot de selle, le garde-boue avant, les coques de réservoir et la nacelle de phare, qui se marie magnifiquement avec le blanc et le rouge sang de bœuf du cadre et de la carrosserie. La série limitée est équipée d’un échappement Akrapovic en titane qui reste légal mais apporte une sonorité plus profonde, en plus du gain de poids (la moto pèse quand même 222 kg sur la balance).
ADN course
Cette machine est bien une moto de route civilisée, avec des fonctionnalités de conduite modernes, grâce à l’écran tactile de 110 mm animé par le logiciel maison, Ride Command. Il permet aux pilotes de personnaliser leur conduite en ajustant les paramètres, y compris les modes de conduite, le contrôle de traction, l’affichage du compteur de vitesse, et plus encore. Une électronique poussée est au service du plaisir de conduite avec le contrôle de traction dynamique, l’ABS avec pré-contrôle en courbe, et les systèmes de contrôle de la stabilité selon l’inclinaison et l’anti-wheeling de série. La moto développe 123 ch à 8250 tr/mn.

Retour sur une réussite sportive unique
Indian est entré sur l’anneau pour la dernière manche du championnat US 2016. Sous ses couleurs se présentait le pilote d’essai et ancien champion Joe Kopp, avec l’idée de faire une saison complète dès 2017. En fait c’est le titre qu’Indian va remporter dès cette année-là. Depuis, sur les 85 courses que les motos frappées du sigle de l’Indien ont disputé, elle en ont remporté 76. Pour les amateurs de statistiques, ça représente 89 %. Et je ne parle même pas des accessits car il y a eu des Indian sur toutes les marches des podiums. Le reste du peloton ne vise pas la deuxième place : ils ont généralement du mal à terminer mieux que cinquième !

Indian a débarqué dans le championnat en 2016 en bénéficiant d’un régime d’exception. Les motos sont traditionnellement issues de la série mais à l’époque, Indian n’avait dans sa gamme que la Scout, un cruiser dont il était impossible de faire une moto de course. Indian et l’AFT sont parvenus à un compromis : Indian serait autorisé à construire et à concourir avec un moteur de course pendant deux saisons, avant d’adopter un moteur extrait d’une moto de route de série. Cela permettrait à Indian, encore une petite marque vendant peu de motos, de prendre pied dans la discipline. Les marques concurrentes, Harley inclus, ont été compréhensifs et ont accepté la concession. Et puis cette exception ne durerait que deux ans, alors… Polaris a mis au travail une société qu’ils possédaient, SwissAuto, pour créer le moteur de la FTR 750, et ils ont fabriqué une mécanique de battant en seulement neuf mois. Indian a alors reproduit ce que Honda avait fait au milieu des années 1980, lorsqu’ils ont créé la RS 750D : ils ont repris bon nombre des caractéristiques du moteur XR 750 et l’ont mis à jour avec autant de technologie moderne que l’autorise le règlement. Le FTR 750 a quatre soupapes par cylindre, comme les moteurs japonais, ce qui en fait deux de plus que celui du XR 750, qui en plus est culbuté. Il est refroidi par eau, là où le XR 750 était refroidi par air. Il est à injection, quand le XR 750 utilisait encore des carbus lorsqu’il a remporté sa dernière course, en 2017. Mais surtout l’avantage d’Indian, par rapport aux autres équipes de course basées sur des motos de route, était de pouvoir concevoir de tout nouveaux carters avec de la place pour des volants moteur lourds de grand diamètre. Les équipes, les préparateurs et les pilotes s’étaient rendu compte que c’était la lourdeur du volant moteur de la Harley XR 750 qui l’avait rendue si efficace pour convertir sa puissance en traction.

Lors de sa première saison complète, la FTR 750 a remporté 14 courses sur les 18 du championnat. Kawasaki en a remporté trois, une XR 750 privée en a remporté une. Lorsqu’une autre FTR 750 a été proposée à un pilote privé, elle a aussitôt donné de bons résultats, et ainsi devint dans le paddock la moto qu’il fallait avoir. Ensuite, Indian a annoncé qu’ils en vendraient 50 à des équipes ou pour des collectionneurs. La grille s’est remplie de privés sur des FTR à 45 000 $. Tous ceux qui avaient une chance de gagner savaient qu’ils devaient être sur une Indian, ou avaient besoin d’un contrat bien payé avec Harley pour les empêcher d’utiliser une FTR 750 !

Malgré l’enrôlement dans leur propre équipe de trois pilotes anciens champions ou vainqueurs de course, l’équipe Harley, cornaquée par Vance & Hines, pouvait à peine taper un podium, sans parler d’une victoire. Leur pilote le mieux placé s’est classé septième au championnat 2017, dixième en 2018, sixième en 2019, et en 2020, l’usine Harley s’était retirée of- ficiellement du flat-track, laissant Vance & Hines diriger une équipe privée. Des rumeurs non confirmées disent que Harley a dépensé 6 millions de dollars avec Vance & Hines.
A présent, tant d’équipes ont investi dans des FTR 750 que la moto ne peut plus être retirée comme cela aurait dû être à la fin de sa deuxième année de course. Au lieu de cela, il y a saison après saison des ajustements de règles limitant les performances de l’Indian. Ça doit normalement laisser penser à d’autre marques qu’elles peuvent gagner un jour…