Patron de la Sima, ancien pilote et concessionnaire, créateur de Mash, Frédéric Fourgeaud était un géant de la moto française. Il est décédé accidentellement samedi 18 mars.
Moteur ! Comme au cinéma, la vie de Frédéric Fourgeaud a commencé par ce mot, cette injonction. Et c’est une vie de cinéma (et de cinéphile) qu’aura vécu ce géant de la moto. Elle s’est brutalement interrompue samedi 18 mars alors qu’il bricolait sa voiture de course dans sa propriété ardéchoise. Avec Fred, la moto française a perdu un grand patron, visionnaire et engagé, mais surtout l’un de ses plus grands passionnés. Depuis l’achat de son premier 50 Malanca, à 14 ans, Fred n’avait plus vécu que pour et par la moto.
Originaire du Limousin, Fred s’était retrouvé à Amiens après le divorce de ses parents. Son histoire motocycliste est donc picarde avant tout. Après les cyclo-sport, il se paye à 16 ans sa première moto en travaillant l’été chez son père, vendeur d’explosifs. Avec cette Honda CB 350, il s’inscrit à sa première compétition, la course de côte de Montmarquet dans la Somme, qu’il termine deuxième. Commence sa première carrière, celle de pilote. Vice-champion de France de course de côte, il dispute la coupe Kawa en 1974 et 1975, puis roule en championnat de France sur Yamaha en 500. Avec une OW31, il se lance en Inter mais renoue avec Honda et Kawasaki pour l’endurance. Il termine sa carrière en Production, officiel Godier-Genoud aux côtés de Pierre-Etienne Samin et Jean Monnin.
Lorsqu’il n’enfile pas son cuir le week-end, Fred porte une cote la semaine, celle de mécano. Un temps apprenti chez un concessionnaire Ossa, ce qui lui permet de croiser pour la première fois l’un de ses futurs maîtres, Marcel Seurat, il ouvre à 20 ans son premier atelier. Il a 800 francs en poche mais de la “gnac” à revendre. Agent Yam, il vend 70 motos dès sa première année et devient rapidement concessionnaire KTM, BMW puis Kawasaki et Honda.
En 1998, Fred Fourgeaud change de braquet : après 20 ans de concessions, il revend Fourgeaud Motos pour reprendre les lubrifiants Ipone avec Ernst Zaugg, président de Motul. Pendant 8 ans, il apprend le métier d’industriel avant d’être appelé à la SIMA, la Société d’Importation de Motos et Accessoires, créée à Beaune en 1976. La SIMA est en difficulté depuis le décès de l’emblématique Marcel Seurat. Après avoir accompagné Jeannine Seurat, il reprend l’entreprise en 2006 avec un associé, Dominique Delsart.
Concessionnaire, importateur, même combat ? Rapidement, Fred Fourgeaud comprend que le distributeur est comme le marchand de moto : à la merci de son fournisseur, qu’il soit importateur ou constructeur. Pour pérenniser la SIMA, Fred devient fabriquant en créant Mash en 2012. Il est ainsi le pionnier de la petite cylindrée néo-rétro fabriquée en Chine, et sera sans cesse copié. La SIMA continue néanmoins de développer son portefeuille de marques en reprenant la distribution pour la France et le Benelux de Moto Morini et surtout de Royal Enfield.

Fin 2021, Fred avait créé la surprise en annonçant vendre la SIMA pour prendre du recul. Son objectif premier était d’assurer le futur de son entreprise et de ses salariés, qu’il considérait comme sa seconde famille. La situation économique avait fait capoter l’affaire, mais il est vrai que nul n’imaginait la SIMA sans Fred Fourgeaud. C’est pourtant la triste réalité de ce gris dimanche 19 mars.
A Jules, qui était revenu dans le réseau, à Hugues, à toute la famille de Fred et aux salariés de la SIMA, Cafe Racer présente ses plus sincères condoléances.